Le Concert

— Nicolas de Staël (1914-1955)

C’était une grande toile de trois mètres cinquante de haut sur six mètres de long. Inondée par le rouge. Un océan de rouge. Je n’en revenais pas. Comment avais-je pu à ce point oublier, alors que j’avais vu l’œuvre quelques années auparavant dans une grande rétrospective parisienne du peintre et que j’avais conservé précisément à l’esprit son motif, et intacte dans ma chair l’impression qu’elle m’avait faite, comment avais-je pu oublier sa terrifiante monumentalité ? Se pouvait-il que cette monumentalité justement se soit convertie dans mon corps en intensité et que ma mémoire en ait réduit volontairement le format pour le loger en moi-même ?
(extrait de Nicolas de Staël. Le vertige et la foi, Arléa, 2014)